Activités et culture
Kuujjuarapik
KUUJJUARAAPIK signifie « petite rivière(1) ». C’est ici que les premiers pasteurs sont venus répandre la parole de Dieu. L’un d’eux en particulier, le révérend W. G. Walton(2), voyait tous les ans de nombreux Inuits, dont il baptisait et nommait les enfants. Moi-même je suis né le 1er janvier 1914 et il m’a baptisé en 1917; j’ai toujours mon certificat de baptême même si j’ai soixante-dix-sept ans maintenant.
Le pasteur qui baptisait les bébés leur donnait un nom qallunaat(3), mais les Inuits continuaient à appeler leurs enfants par leurs noms inuits. Le pasteur mariait aussi les couples qui venaient tout juste de se rencontrer et baptisait non seulement les enfants, mais aussi hommes et femmes adultes ou aînés. Ce n’est que vers les années 1910 ou 1920 que les Inuits ont entendu parler de Dieu et de Jésus(4) . Par la suite, les Inuits de toute la région de la baie d’Hudson venaient à Kuujjuaraapik pour en savoir plus sur la religion. Pendant l’hiver, toute la famille voyageait en qamutik (traîneau à chiens).
Dans les collectivités les plus au nord, les gens âgés attendaient le retour de la famille, qui au printemps allait rapporter du bois pour fabriquer des qajaqs, car il n’y a pas d’arbres dans ces régions.
En ce temps-là, Kuujjuaraapik était un village très important, où vivaient des Qallunaat et un prêtre. Il y avait aussi un poste de traite, le premier sur toute la côte de la baie d’Hudson. Il y avait aussi des Indiens.
Aujourd’hui, Kuujjuaraapik n’est plus la principale collectivité de la région de la baie d’Hudson, car une bonne partie de sa population inuite s’est relogée à Umiujaq. La population blanche de Kuujjuaraapik est la plus importante sur la côte de la baie d’Hudson.
Territoire
La municipalité de village nordique de Kuujjuarapik est située à l’est de la baie d’Hudson, au sud des îles Manitounuk, sur la rive nord de la Grande rivière de la Baleine. Le territoire de cette communauté, des terres de catégorie 1, est très restreint, avec une superficie de 15,3 kilomètres2 seulement. La superficie du territoire et les droits qui s’y rattachent sont délimités par le régime des terres issu de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.
On doit se rendre à Kuujjuarapik par avion.
Description
Kuujjuarapik est une localité très particulière en ce qu’elle a quatre noms. En plus de son nom en inuktitut, Kuujjuarapik est également désignée sous le nom cri de Whapmagoostui puisque deux communautés appartenant aux nations des Cris et des Inuit y sont jumelées. L’endroit s’appelle aussi, en français, Poste-de-la-Baleine et, en anglais, Great Whale River.
Une poste de traite était établi dans la région au milieu du dix-huitième siècle par la Compagnie de la Baie d’Hudson. Cet établissement portait le nom de Fort Richmond. Une mission protestante s’est établie dans les années 1880. Le gouvernement fédéral y a installé une station météorologique en 1895. En 1940, la Gendarmerie royale du Canada y établissait un poste.
L’armée américaine a construit une base militaire à cet endroit dans les années 1940, recrutant des travailleurs parmi les Inuits et les Cris, ce qui a entraîné la cohabitation des deux groupes qui se poursuit une cinquantaine d’années plus tard. » Kuujjuarapik » signifie » la petite grande rivière « . Ce nom a été adopté pour remplacer celui de Kuujjuaq que les Inuit utilisaient auparavant et qui a été adopté officiellement par l’ancien Fort Chimo. Ce changement est justifié du point de vue strictement géographique puisque la Grande rivière de la Baleine a un débit inférieur à celui de la Koksoak, à l’embouchure de laquelle se trouve l’actuelle Kuujjuaq. Une station de radar a été établie à Kuujjuarapik dans les années 1950, décennie qui a vu l’arrivée de services éducationnels et de services de santé, suivant de près les allocations familiales et les pensions de vieillesse, vers la fin des années 1940.
La constitution en municipalité de village nordique, en 1980, a amené l’adoption officielle du nom Kuujjuarapik. Jusque là, la communauté était habituellement désignée surtout par le nom de Great Whale River et parfois, en français, par celui de Grande-Rivière avant que ne prédomine l’actuel Poste-de-la-Baleine. Ce dernier remonte à l’époque de l’établissement d’une station de recherche par le Centre d’études nordiques de l’Université Laval, au cours des années 1960.
Lors de la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, cette communauté inuit avait opté pour un nouvel emplacement, à l’endroit où se trouve l’actuelle communauté d’Umiujak. Une partie de la population s’y est relocalisée en 1986, mais la majorité des membres de la communauté inuit de Poste-de-la-Baleine sont restés à Kuujjuarapik.
Cette communauté se trouve à 100 kilomètres au sud de la limite septentrionale des arbres, à l’intérieur de la zone hémiarctique.
Administration
L’administration locale est assurée par le conseil municipal du Village nordique de Kuujjuarapik. Le conseil municipal du Village nordique de Kuujjuarapik fait partie de l’Administration régionale Kativik.
Économie
La coopérative locale est active dans les secteurs suivants : la vente au détail, la production de sculptures et d’artisanat, la mise en marché des fourrures, la distribution des produits pétroliers, la restauration et la récréation.
Les activités traditionnelles comprennent la chasse au phoque, au béluga, au caribou et à la bernache canadienne, entre autres. On y pêche l’omble chevalier, le saumon et la truite grise, entre autres espèces.
Services
Kuujjuarapik a deux établissements hôteliers : l’Auberge Sinittavik et l’Hôtel de la coopérative de Kuujjuarapik, administré par la Fédération des coopératives du Nouveau-Québec. On y propose différents forfaits d’intérêt touristique.
Kuujjuarapik a une radio communautaire, la radio FM inuit Kuujjuarapik, au 103,5 MHz.
Pour un complément d’informations: www.nvkuujjuaraapik.ca
(1) Se traduit aussi par « rivière étroite au courant fort ».
(2) Né en 1869 à Birmingham au Royaume-Uni, William Gladstone Walton eut la révélation de sa vocation à l’âge de 18 ans. Séduit par l’appel des missions nordiques au Canada, il arrive à Fort George en 1892. Il voyageait six mois par an, se déplaçant en canot pour visiter les Indiens en été, et en traîneau à chiens pour se rendre chez les Inuits en hiver. Sa femme et proche collaboratrice, Daisy Alice Spencer, le remplaçait à Fort George lorsqu’il devait s’absenter. Ensemble, ils ont traduit et publié plusieurs ouvrages en langue crie, ainsi qu’une partie de la Bible en inuttitut. La réputation du révérend Walton était telle que les Inuits voyageaient depuis la baie, voire le détroit d’Hudson pour l’entendre prêcher ou recevoir de sa main le sacrement du baptême ou du mariage. Il a vécu 32 ans dans l’Arctique, où il a travaillé jusqu’à sa retraite en 1924.
(3) Terme désignant toute personne non autochtone. Le terme signifie littéralement « ceux qui soignent leurs sourcils ».
(4) En fait, le révérend Peck avait déjà commencé à convertir des Inuit vers les années 1870 à Kuujjuarapik et surtout à Qilalugarsiuvik (petite rivière à la Baleine), mais il se peut que les Inuits d’autres régions aient échappé à son influence.